Nixon Phillipe : « Il n’existe aucune société égalitaire dans le monde »
Le rapport existentiel entre dominant et dominé a toujours été au cœur des relations humaines. Dans toutes les sociétés ou presque, surtout celles de complexion patriarcale, la femme fait l’objet de discrimination, de marginalisation depuis plusieurs siècles. D’où les qualificatifs stéréotypés comme « sexe faible », être inférieur et non l’égale de l’homme. Privée de ses droits, elle était le paria au regard des lois, des normes et des principes sociaux. Lesquels sont écrits exclusivement par des hommes, qui les ont marqués de leur empreinte idéologique (sexisme, machisme) et des conceptions aberrantes sur la question du genre, dont le but est de la faire intérioriser l’idée de son infériorité. Tout groupe opprimé, privé de ses droits trouve tôt ou tard un moyen de se libérer. Ainsi des femmes ont mené des mouvements pour revendiquer leurs droits et avoir gain de cause. D’abord en Europe, ensuite pour toucher plusieurs pays sur d’autres continents. Et ce combat a une appellation commune qu’est le féminisme.
Le féminisme est une doctrine ou une attitude politique, sociale et philosophique, fondée sur l’égalité des sexes. Il peut être aussi défini comme étant une réaction violente des femmes qui avaient été privées de leurs droits, même celui de posséder leur propre corps et d’en faire usage qui leur plait. Ce mouvement a pour objectif de bâtir une société sans hiérarchie de genre. De fait le féminisme est vu comme la voie idéale à toute femme aspirant à cette égalité sociale. C’est dans cette optique qu’a pris naissance le féminisme haïtien. Lequel est imprégné de celui des Afro-américaines, et surtout de celui de la France. Compte tenu des liens existant entre cette dernière et Haïti. A tel enseigne que la marque française fait partie intégrante du vécu haïtien. Que ce soit au niveau éducatif, culturel et même à travers les lois fondamentales du pays. Donc ce contact avec la France a permis à des femmes de construire leur pensée, la consolider pour la rendre opérationnelle. Ce qui va donner la première manifestation réelle du féminisme en Haïti avec la création de la Ligue Féminine d’action sociale (LFAS- 1934). Ensuite l’apparition d’autres organisations féministes jusqu’à l’érection d’un ministère (MCFDDF) œuvrant à l’émergence d’une société sans hiérarchie de genre.
Il est dans la nature du dominant d’asseoir et de maintenir sa domination dans le temps autant que possible. Et toute situation visant à bouleverser ce statu quo sera combattu, souvent avec la plus grande rigueur. Parfois jusqu’à l’élimination physique. Les féministes sont marginalisées même par d’autres femmes, héritières d’une éducation dès l’enfance qui préconise leur infériorité.
Alors elles sont obligées de mener seules ce combat face un système mis en place au détriment d’elles-mêmes. En créant les conditions pour la réalisation effective de leur liberté. Puisqu’elles savent qu’un opprimé ne réclame pas sa liberté à son oppresseur. Alors ces femmes se forment beaucoup plus intellectuellement pour détruire les idéologies qui les asservissent, et œuvrent à être dépendantes que d’elles-mêmes sur plusieurs aspects. Néanmoins le mode opératoire du féminisme en Haïti ne rime pas avec la réalité sociale du peuple, car il n’a pas été repensé assez à cette fin. Lequel est de culture différente, un niveau d’éducation différent, et une autre vision du monde. De fait les féministes devraient éviter de revendiquer des éléments culturels et des pratiques étrangères qui sont antinomiques à ses valeurs dont il n’est pas prêt à accepter. Car une révolution de mentalité est possible, si le peuple est préparé. Alors il faudrait un travail à la base et graduellement il pourra adopter de nouveau paradigme. Pour ce, elles devraient investir certains pouvoirs qui permettront de diffuser, faire comprendre le pourquoi du mouvement et ramener plus de gens à cette cause. Ce travail serait fait par le pouvoir médiatique qui servirait de prémisse à l’éducation de masse. Cela aiderait à avoir une représentativité significative dans les hautes sphères politiques pour peser dans les grandes décisions qui engageront la nation et combattre toute forme d’exclusion liée au genre. Investir au mieux le pouvoir éducationnel pour une rééducation des gens, surtout les enfants et les jeunes. Ce qui devrait être fait suivant l’évolution de la mentalité du peuple et avec le plus de rationalité pour voir ce qui est possible ou non. En raison de la complexité du problème, car la subordination de l’élément féminin est à plusieurs niveaux même à travers la langue (Français) par des dispositions grammaticales. Donc c’est difficile d’enlever de l’imaginaire collectif cette perfection de la femme. En plus ce qui est paradoxal dans les lois des peuples, c’est que les lois qui garantissent l’égalité des personnes, sont les mêmes qui créent un certain favoritisme basé sur des critères qui peuvent être l’âge, capacité physique, faculté mentale ou psychique, le sexe etc. Il est indéniable qu’il n’existe aucune société égalitaire en ce monde.