Société

Pourquoi les jeunes doivent s’impliquer dans la politique en Haïti

1946 : le Lycée Anténor Firmin, 1956 : le fameux rouleau compresseur ; du nationalisme à l’indigénisme ; du noirisme à la négritude ; du mouvement GNB au Challenge « Petwokaribe »… la liste est interminable. Ce sont tous des moments forts que le pays a connu grâce à l’implication de la sève vive de la nation de Anténor Firmin à Jean Price-mars, des frères Nau à Justin Lhérisson… Face au désengagement de la jeunesse, que faire ?  Pourquoi s’impliquer ?

             Le lendemain de l’indépendance a vu naître des guerriers de cœur défendant, tant par leur bras et voix que par leurs larmes et encres, l’âme nationale. L’Ayiti cheri était la seule chose qui les réunissait ou les divisait. Nonobstant que la jeunesse haïtienne se soit impliquée dans la vie nationale dans le passé, le désengagement progressif actuel des jeunes est un véritable défi. On rencontrera des jeunes davantage dans des bars, des manifestations futiles tels les rabòday et les « Car wash party »… plutôt que dans des activités mettant en exergue leur implication dans la vie sociale.

              Alors que la politique, elle, transcende le présent, la plupart des jeunes semblent négliger leur rôle à jouer. Peut-être sont-ils moins intéressés par la scène politique à cause des dangers qui vont avec. Peut-être qu’ils ignorent l’importance de leur implication, voire même comment participer à la vie nationale. Par-dessus-tout, une chose est sûre, la jeunesse actuelle ignore les raisons pour lesquelles son implication dans la politique est cruciale. Éclairer ces points susmentionnés, permettra d’associer jeune et politique sans plus de circonvolution dans notre approche ci-après.

Une question du quotidien

            En effet, beaucoup de gens fuient la vie politique par mésinterprétation stéréotypique des acceptions qu’elle détient : Il ne s’agit pas d’une culture du non-dit et du mensonge ! De fait, s’impliquer dans la politique ne se limite pas à adhérer à un parti, se présenter aux élections. S’impliquer dans la politique signifie, surtout, de participer à la vie sociale, exprimer son choix aux élections, organiser des activités liées à l’économie, l’écologie ; faire des choix au nom de la patrie ; représenter l’âme nationale ici et ailleurs. Passer au crible l’ensemble des acceptions que le fait de s’impliquer dans la politique détient serait fastidieux.

         S’impliquer dans la politique signifierait donc d’adopter un comportement citoyen pour le bien du vivre-ensemble, en participant aux décisions qui s’y prennent, en apportant le changement nécessaire, en tentant d’améliorer le futur de la nation. S’impliquer dans la politique c’est manifester son « Haïtienneté« , comme Firmin, Coicou, Sully… se sont donnés corps et âmes pour leur kiskeya bien aimée.

La jeunesse en politique

              Il n’y a pas d’âge pour commencer à faire de la politique, il n’y en a pas non plus pour s’arrêter. Alexandre le Grand, Lénine, Thomas Jefferson, Benjamin Franklin… Ce sont tous des sangs neufs qui se sont faits des figures incontournables de l’histoire des civilisations passées : tous des jeunes ! Il est donc légitime que la jeunesse s’implique dans les affaires de la nation. Écologie, économie, finance, santé… ce sont tous des aspects de la vie nationale qui s’ouvrent vers des cadres compétents et qui nécessite l’intervention de l’intelligentsia nationale. Les jeunes doivent donc s’impliquer dans la politique pour s’assurer la bonne marche de l’Etat.

Une jeunesse consciente du poids du futur

            Si aujourd’hui la population juvénile haïtienne représente près de 48% de la nation, les jeunes sont inévitablement l’intégralité de son futur. Ce sera aux jeunes d’aujourd’hui de subir les retombées de la déforestation massive ; ce sont eux qui devront assumer les conséquences des inégalités sociales d’aujourd’hui. Pour ne citer que ceux-là, les jeunes devraient être les premiers concernés des phénomènes sociaux, culturels, économiques actuels, car la politique d’aujourd’hui transcendera le présent pour s’immiscer dans le futur de la nation. Cela met en exergue l’impératif que la jeunesse s’implique dans la politique.

            Mieux vaut prévenir que guérir ! La jeunesse actuelle se doit, donc, d’adopter une attitude consciente des responsabilités qui lui seront incombées dans dix, quinze, vingt ans et plus. Étant une part importante de la population actuelle, cela constitue un réel avantage par lequel les jeunes peuvent faire valoir leurs attentes, et revendications. La condition sine qua non d’un futur meilleur est donc l’adoption d’un comportement responsable par l’implication dans la politique en posant des actions un tant soit peu réfléchies.

La jeunesse un vecteur de changement

           La jeunesse a depuis longtemps été considérée comme un vecteur du changement social, soit, du côté des tenants de l’ordre, pour s’inquiéter de ses éventuels débordements, soit, du côté des progressistes ou des révolutionnaires, pour se réjouir de sa capacité contestataire.

          Le concept Jeunesse, depuis des décennies à largement dépassé le cadre essentialiste qu’on lui conférait depuis des décennies. Il ne s’agit plus de ce vil syntagme désignant cette période difficile de maturation psychologique qui devait conduire à l’âge adulte. Non que ces définitions soient, dans leur champ propre, critiquables ; mais elles ne pouvaient prétendre fournir les bases d’une définition sociale de la jeunesse. Celle-ci doit en effet se garder de l’écueil essentialiste, qui confère à la jeunesse une nature éternelle, que celle-ci soit psychologique ou morale, tendant à en faire ainsi une catégorie anhistorique et asociale dont les comportements sont fixés une fois pour toutes.

            Il s’agit du moteur de l’intelligentsia haïtienne. Technologies, innovations, transformations, révolutions… Les jeunes en sont les instigateurs légitimes.  Alors plutôt que de se plaindre que le pays n’offre quasiment rien, la jeunesse se doit de préférence, d’offrir le changement qu’elle a dans sa nature intrinsèque. Encore une fois, la condition sine qua non est l’engagement ! La jeunesse doit donc se passer du statut d’observateur passif à celui d’acteur conséquent. Alors pourquoi en pas un ministère de la jeunesse et de l’économie, des finances, de la santé, de l’éducation. L’implication dans la politique est la voie vers la valorisation et la concrétisation de ces aspirations.

Au-delà du cynisme

           Au-delà l’importance de l’implication des jeunes dans la vie nationale, il existe certains facteurs qui constituent de véritables freins à l’implication des jeunes. Guerres, enlèvements, exécution, sommaires, enlèvements, ce sont tous des faits qui reviennent sempiternellement sous la scène politique, depuis la création de la nation mère. Cette comédie noire à laquelle participent les responsables politiques de nos jours, met certes en exergue les faiblesses de ce phénomène sociétal, elle constitue aussi une barrière à l’entrée pour la jeunesse fiévreuse de changement.

            D’autre part, contre toute attente, la politique en Haïti sous-entend une culture de la ruse, du mensonge et du non-dit. La corruption est la gangrène qui privent nos frère et sœurs de la vie qu’ils méritent. Or, les jeunes, à leur stade sont en quête de liberté d’action et d’expression. Certains soulignent même que la vie politique s’imprègne de beaucoup trop de restrictions et de vulnérabilités morales.

              Cela explique le fait que beaucoup se livrent à des activités ludiques plutôt que d’apporter leurs soutiens afin que l’anarchie et le sous-développement soient pourfendus. L’engagement fait place à la débauche ; à l’explosion démographique ; à l’acculturation et l’augmentation continue de population carcérale, dont seulement une frange est constituée d’hommes et de femmes qui n’ont pas été manipulées par un de ces fripons qui promettent frénétiquement le changement.

              Il est clair que la société est en proie à un ensemble de pratiques impérieuses. Partant de ce regard pessimiste que les jeunes ont sur la vie nationale, parler d’engagement est peu envisageable chez les jeunes.

Une prise de conscience…

               Tant que nous initierons des décisions qui auront un impact sur notre environnement immédiat ; tant que nous aurons à réagir aux actions venant de l’extérieur, il nous sera nécessaire d’agir en bonne connaissance du phénomène social qui régit nos comportements afin d’améliorer le vivre-ensemble et de pallier les impactés futurs de nos décisions. S’impliquer dans la politique sous-entend donc de vouloir un changement positif ; d’assurer l’efficacité du vivre ensemble ; de construire un futur meilleur ; de favoriser l’expansion de l’âme nationale.

            Malgré les faiblesses sociétales actuelles, la jeunesse actuelle doit prendre conscience que la mauvaise gouvernance d’aujourd’hui engendrera les freins socio-économiques et politiques de demain. Prendre le taureau par les cornes aujourd’hui est donc la meilleure attitude à adopter. Même s’il n’y a pas d’âge pour s’impliquer dans la politique, s’impliquer dans la politique nécessite la force de l’âme vive, encore plus il faut être jeune.

               L’engagement des jeunes entraverait elle celui des moins jeunes ? La corruption s’estomperait elle ? Delà étant la jeunesse actuelle a-t-elle le niveau nécessaire pour s’assumer ? Les interrogations ne manquent pas quant à l’incidence qu’aurait l’implication responsable d’une population juvénile en masse.

Guerson Dukens JOSEPH

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