Les nouvelles perspectives pour l’année fiscale 2020-2021
Après un exercice fiscal difficile, découlant du phénomène de « peyi lok », de surplus la covid-19 qui fragilise le pays sur le plan macroéconomique, le chef du gouvernement a adressé sa lettre de cadrage pour l’exercice fiscal 2020-2021 aux différents ministères et institutions concernés.
La lettre de cadrage, de quoi s’agit-il? Ce terme (lettre de cadrage) échappe à l’attention de la majorité des agents économiques. A priori, la lettre de cadrage est le premier pas, après l’analyse, vers l’élaboration d’un budget. Elle traduit le choix du gouvernement en matière de préparation de budget. Ce document écrit comporte toutes les orientations et les grandes lignes du budget.
La première partie du document constate l’environnement difficile dans lequel le processus de l’exercice fiscal 2020-2021 a été préparé. Malgré les épisodes récurrents de troubles socio-politique, le gouvernement se vante d’avoir doté le pays d’un budget pour l’exercice fiscal 2019-2020, au cours duquel, quelques voies et moyens ont été dégagés pour acheminer les transferts sans contrepartie de la diaspora vers les ménages les plus vulnérables. Il se dit aussi avoir régularisé la situation d’environ 10000 enseignants et deux (2) promotions de policiers.
Les méfaits de la Covid-19 ont de graves répercussions sur les importations et les exportations des biens et services, pendant que les exportations ont connu une baisse de 26.6% au cours des trois premiers mois de l’exercice fiscal 2019-2020, comparativement à l’exercice précédent, soit 639 millions de dollars à fin juin 2020, contre 870.7 millions sur la même période en 2019, les importations continuent à croître, soit 2.4 milliards dollars. Ce qui garantit un important déficit budgétaire.
Malgré un léger glissement annuel concernant les transferts de 0.52%. Soit 1.9 milliard de dollars en 2020 contre 1.7 milliard en 2019, la gourde n’a pas cessé de se déprécier face au dollar américain. La gourde a perdu une valeur de 26% au cours des dix (10) premiers mois de l’exercice 2019-2020. Du côté de la dépréciation de la gourde, s’arrange une inflation pernicieuse de 20.1% en septembre 2019, pour atteindre 25.7% en juillet 2020. Avec des recettes qui croissent moins vite que l’inflation, on enregistre un manque à gagner de 4.6 milliards de gourdes.
La performance en fin de l’exercice n’a pas été autant désastreuse que le commencement. Une contraction du PIB devrait projeter. On a enregistré un taux de croissance moins prononcé que ce qui avait été prévu soit -2.9% contre -3.6% anticipée dans le budget de l’exercice 2019-2020.
A travers de cette lettre de cadrage figure un nouveau plan de relance économique, dénommé PREPOC (Plan de relancement économique post covid-19), qui couvrira les trois prochains exercices (2020-2023). Ce plan, considéré comme une réponse aux différentes contraintes structurelles infligées par le coronavirus, s’articule sur six piliers, qui comprennent soit à diversifier ou à développer un secteur économique quelconque soit à renforcer ou développer un domaine d’investissement ou une institution. Ce plan inclut aussi deux domaines transversaux à savoir : une gouvernance administrative, économique et financière ; un climat d’affaire
Les grandes orientations du budget 2020-2021 devraient se baser sur les six piliers et les deux domaines transversaux du PREPOC. Ce budget consacrera comme segment de priorités : Le renforcement de la sécurité, des services d’infrastructures, des politiques d’inclusion sociale, le développement de certains secteurs porteurs de croissance et l’amélioration de la gouvernance, spécifiquement l’efficacité de la gestion publique.
Ainsi que la loi de finance repose sur les projections suivantes :
• Une croissance de PIB de l’ordre de 2.4% ;
• Une inflation de fin d’exercice estimée à 27.3% en glissement annuel ;
• Des recettes fiscales à 100 milliards de gourdes ;
• Une pression fiscale de 6.5% en raison de l’élargissement de la base des comptes nationaux de l’IHSI ;
• Des émissions nettes de trésorerie à 10 milliards de gourdes ;
• Un niveau de financement compatible aux objectifs de stabilisation du cadre macroéconomique.
A travers les orientations faites aux différents ministères, on peut constater des réponses à différentes préoccupations. Mais une lettre de cadrage reste et demeure une prévision faite de l’année fiscale. Rien ne dit que tout ne va se passer à la lettre. Considérant les problèmes les plus pertinents, les ministères de la justice doivent orienter leurs budgets de manière à endiguer l’insécurité, pour assurer la libre circulation des citoyens tout en priorisant les zones productifs et touristiques. L’environnement social du pays n’est pas prêt à absorber une telle initiative car les autorités n’ont pas encore le contrôle exhaustif des douanes, ce qui favorise la rentrée à profusion des armes illégales sur le territoire. Frappés par le chômage et la disette, certains gangs affirment que leurs armes sont leur gagne-pain et ils sont prêts à les lâcher qu’en échange d’une vie meilleure.
Le ministère de l’économie et des finances, dans sa nouvelle orientation de renforcer le programme de stage pour faciliter l’insertion professionnelle de milliers de jeunes diplômes dans les institutions publiques privées, devrait répondre aux problèmes de sous-emploi que certains gangs gardent comme prétexte pour ne pas lâcher-prise. Mais l’objectif du ministère de l’économie et des finances visent les diplômes, et la majorité des gangs ne le sont pas, ce problème semble encore perdurer. A travers l’objectif précis de ce ministère, les jeunes diplômés peuvent espérer d’un emploi dans les prochains mois de l’exercice. Si nous accentuons sur le fait que les employés haïtiens ont la mauvaise discipline de ne pas préparer leur retraites, ce qui leur mettent toujours en situation de besoin d’un salaire pouvant couvrir leur dépense malgré leur vieux âge, le problème d’embaucher des jeunes semble échelonner dans le temps.
Beaucoup de prévisions, chaque ministère travaille sur leur orientation. La grande absence de cette liste de cadrage, c’est le ministère de l’éducation. Est-ce que cela signifie que le système éducatif haïtien est trop performant pour connaitre des améliorations ? Ou réserve-t-on une lettre particulièrement pour ce ministère ? Le budget d’un pays devrait-être une orientation professionnelle pour les jeunes. Tenant compte des limites de cette lettre de cadrage, dans l’enceinte de laquelle puiser le budget, les jeunes pourront-ils vraiment compter sur ce budget ?
Le budget est prévisionnel. Une espérance sur les collections d’impôts qui représentent les recettes, sur une bonne balance commerciale. Déjà un déficit budgétaire élevé enregistré pendant l’exercice fiscale précédent, devrions-nous espérer grande chose de la faisabilité de ce budget comme prévu ?